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La honte de l’« accueil » inhumain réservé aux migrants dans les P.O. !! Lettre ouverte au préfet...

Nous reproduisons ci-dessous la lettre que le Comité de soutien au Collectif des sans-papiers des PO (*) a adressée au Préfet du département. Avec copie, outre aux rédactions de la presse locale et nationale, à : Premier Ministre, Ministre de l’Intérieur, Défenseur des Droits, Ségolène Neuville (Secrétaire d’Etat à l’exclusion), Hermeline Malherbe (sénatrice des P.O.), François Calvet (sénateur des P.O.), Jacques Cresta (député des P.O.), Pierre Aylagas (député des P.O.), Fernand Siré (député des P.O.), Robert Olive (député des P.O.), Directeur de la Direction départementale de la Cohésion sociale, Délégué départemental du Défenseur des Droits.

Perpignan, le 7 novembre 2016

Nous sommes indignés de constater que la préfecture des Pyrénées-Orientales multiplie les décisions inhumaines, absurdes, voire illégales à l’encontre des familles déboutées de leurs demandes d’asile par manque de preuves matérielles, mais qui, gravement menacées dans leur pays, se maintiennent en France, sans droits, sans aides matérielles, dans la plus grande misère.

Depuis plus de deux ans, elle s’est tristement illustrée par des pratiques récurrentes qui font fi des considérations humanitaires les plus élémentaires, dérogent au fonctionnement habituel des procédures classiques et contredisent même les recommandations officielles du ministère de l’Intérieur.

1) Ces pratiques inhumaines sont patentes dans plusieurs cas :

  • Elles concernent en premier lieu les enfants des personnes assignées à résidence. Cette mesure concerne uniquement les parents qui doivent émarger hebdomadairement à la PAF (Police Aux Frontières). Or, notre préfecture impose la présence systématique des enfants, quel que soit leur âge, qui vivent avec une angoisse extrême cette contrainte, alors qu’aucun texte officiel ne la permet.
  • Cela se vérifie aussi dans le traitement des procédures d’expulsion : ainsi, une famille composée des grands-parents, des parents et des enfants, en fait les frais. Le couple parental, mixte arméno-azéri, appartenant à deux pays ennemis, ne peut être renvoyé ni dans l’un ni dans l’autre de ces pays et la Cour Européenne des Droits de l’Homme ne permettant pas la séparation des familles, on s’en prend donc aux grands-parents, sans respecter l’unité familiale et on les assigne à résidence en vue de les expulser, alors même que le grand-père est gravement malade.
  • De même, la préfecture n’hésite plus, lors des procédures de renvoi, à enfermer les familles avec enfants dans le centre de rétention administrative de Cornebarrieu, près de Toulouse. Cela a été le cas pour une famille alors même que le tribunal administratif avait annulé la décision de renvoi prise par la préfecture des P.O. Le Juge des Libertés et de la Détention de Toulouse a annulé cette rétention par une ordonnance particulièrement sévère à l’égard de la préfecture des P.O.

Nous avons également eu connaissance de traitements brutaux lors de tentatives expéditives de renvoi. Ainsi, une famille comprenant les parents et quatre enfants, venue signer à la PAF dans le cadre de leur assignation, s’est vu notifier leur enfermement. Le père, ayant refusé ce départ immédiat, a été aussitôt séparé des siens, ligoté et poussé violemment dans une voiture alors que le reste de la famille était entassé dans un autre véhicule pour être tous emmenés au centre de rétention de Cornebarrieu.

  • Cette inhumanité est nettement flagrante pour les demandes de titres de séjour d’étrangers malades. Il est particulièrement difficile d’obtenir un rendez-vous pour le dépôt d’une telle demande. Quand, de temps en temps, ce rendez-vous est donné et que le dossier est déposé, la préfecture ne donne le plus souvent aucune réponse, laissant courir le délai de quatre mois qui équivaut à un refus, mais l’absence de motivations écrites rend dès lors impossible d’attaquer ce rejet implicite en justice.

Pour ceux qui ont eu la chance d’obtenir un tel titre de séjour, le renouvellement est souvent refusé par la même absence de réponse alors que les personnes concernées sont gravement malades et que leur traitement en cours n’est pas possible dans leur pays.

Dans certains cas, le tribunal administratif, saisi par les intéressés a fait injonction à la préfecture de réétudier le dossier, injonction souvent restée lettre morte.

2) Ce dysfonctionnement arbitraire est patent dans l’application des procédures classiques, comme l’admission exceptionnelle au séjour définie par la circulaire de novembre 2012, dite circulaire Valls, toujours en vigueur.

  • Elle prévoit la régularisation de sans-papiers dans certains cas, notamment une présence en France d’au moins cinq ans et trois ans de scolarité des enfants.

Or, de fait, cette circulaire n’est plus appliquée par la préfecture des P.O. Les dossiers déposés, présentant pourtant tous les critères exigés, dorment durant des mois, sans réponse. Si, d’aventure, le dossier est examiné, c’est pour opposer un refus assorti d’une Obligation de Quitter le Territoire Français sur la base d’arguments spécieux, par exemple : les certificats d’inscription scolaire ne prouveraient pas que l’enfant a été réellement scolarisé, alors que chacun sait qu’il est impossible d’inscrire un enfant dans une classe supérieure si, l’année précédente, il n’a pas suivi régulièrement les cours !

D’autre part, la préfecture des Pyrénées-Orientales exige que la demande soit assortie d’une promesse d’embauche alors qu’il est très difficile de l’obtenir d’un employeur quand on est sans-papiers et que la circulaire Valls ne stipule nulle part une telle condition.

  • On assiste également à des interprétations abusives des textes de loi en ce qui concerne les conjoints de Français : la loi prévoit leur régularisation, s’ils sont mariés, s’ils peuvent apporter la preuve de six mois de vie commune (CESEDA art. L 211-2-1). La préfecture des P.O. ne prend en compte que les six mois après le mariage et non les mois avant le mariage, ce que la loi ne précise pas et alors que d’autres préfectures les comptabilisent.

3) Enfin, les recommandations du ministère de l’Intérieur sont ignorées :

  • Ainsi, la circulaire Valls de 2012 recommande aux préfets : «  vous attacherez une importance particulière aux contacts réguliers avec les organisations syndicales, les organisations d’employeurs et les associations ou collectifs de défense des étrangers reconnus au plan local ou national ».

Or, les associations ASTI et CIMADE ne sont plus reçues en Préfecture depuis juin 2015.

D’autre part, les demandes de rendez-vous du Réseau Éducation Sans Frontières sont ignorées et la préfecture des Pyrénées-Orientales a toujours refusé de recevoir le Comité de soutien au Collectif des sans-papiers de Perpignan.

Lorsque ces relations existaient, la situation de personnes pouvant être régularisées selon le pouvoir discrétionnaire du préfet était étudiée et les échanges apportaient souvent des décisions positives qui ne peuvent être prises par les agents préfectoraux au vu des dossiers.

Nous demandons à Monsieur le Préfet de faire cesser ces pratiques indignes de notre pays à l’égard de personnes en grande faiblesse.

(*) Collectif de soutien au comité des sans-papiers des PO : AFPS, ASTI, Bouge-Toit, CGT, La Cimade, CNT, CNT-SO, CUP, EELV, FSU, LDH, MRAP, NPA, PCF, PG, RCP, Resf, Solidaires


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